mercredi 15 octobre 2008

Les pays nordiques réticents vis-à-vis de l'UE ?

Les pays nordiques sont souvent perçus comme étant hésitants à l’égard de la construction européenne. Si certains de ces Etats ont effectivement adhéré à l’Union Européenne (Danemark, Suède, Finlande), d'autres (Islande, Norvège) ont fait le choix de ne pas la rejoindre, tout en concluant des accords spécifiques avec l’Union… Y a-t-il donc une réticence "eurosceptique" spécifiquement nordique ? Auquel cas, sur quoi se fonde-t-elle ?

Les pays de l’espace nordique ont tous eu des comportements différents à l’égard de la construction européenne.
La situation à l’heure actuelle :
La Finlande, qui a exercé la présidence du Conseil de l’Union durant le dernier semestre 2006, reste, aujourd’hui, le plus intégré et le plus "européanisé" de tous les pays nordiques… Mais d’autres entretiennent des rapports plus ambigus avec l’Europe.

C’est le cas de la Suède, qui a refusé la monnaie unique par référendum en 2003 ou de façon plus accentuée encore, de la part du Danemark, qui avait initialement refusé le traité de Maastricht par référendum et qui, lui aussi, ne fait pas partie de l’union monétaire européenne…

Quant à l’Islande et à la Norvège, leur position à l’égard de l’Union européenne reste très particulière : ces deux pays étant très proche de l’Union, sans toutefois en être membres.


L'Histoire d'une réticence :


Dès les années 1960, le Danemark, la Suède, l’Islande et la Norvège avaient participé au lancement de l’AELE (Association Européenne de Libre Echange), projet alternatif à la CEE de l’époque : une zone douanière ne concernant que certains produits et n’envisageant pas de se transformer en projet politique.

Avec la démonétisation progressive de l'AELE au début des années 1990, ses pays membres allaient soit rejoindre les rangs de l’Union, comme ce fut le cas pour le Danemark en janvier 1973, ainsi que pour la Finlande et la Suède en janvier 1995, soit conclure avec elle des accords bilatéraux : dans le cadre de l’EEE (Espace Economique Européen), comme ce fut le cas avec l’Islande et la Norvège.

Ces accords permettent d’inclure les pays signataires au marché unique, de leur étendre le principe de libre-circulation (de personnes, des capitaux, des marchandises et des services) et de les associer à de nombreux programmes communautaires (notamment en matière d’éducation). En contrepartie, les États en question se doivent d’adopter l’acquis communautaire pour les domaines techniquement couverts par l’accord.

Ces accords font que la Norvège et l’Islande sont en fait aujourd’hui très proches de l’Union sans en être membres. Néanmoins, les norvégiens ont refusé par deux fois l’adhésion (53,5% en 1972 et 52,3% en 1994).

Aujourd’hui, même si les opinions favorables à l’adhésion semblent gagner du terrain dans l’opinion publique norvégienne, il semble que les hommes politiques norvégiens favorables à l’adhésion restent relativement discrets. Après les "échecs" référendaires de 1972 et de1994, aucun gouvernement norvégien ne se lancera désormais plus dans une troisième consultation populaire s’il n’est par avance vraiment assuré de pouvoir l’emporter cette fois-ci.

En revanche, en Islande, la question d’une éventuelle adhésion à l’Union Européenne n’a pas encore captivé l’opinion publique. Le débat a été inhibé pendant longtemps par le très respecté Premier Ministre islandais, Davis Oddson, qui faisait partie des "eurosceptiques". Néanmoins, plusieurs indices laissent à penser qu’en Islande les opinions favorables à l’adhésion gagnent aujourd’hui du terrain.

Les raisons de la réticence nordique :

La réticence des États nordiques à l’égard de la construction européenne semble être le résultat d’une véritable culture locale de l’indépendance. Pour ces pays (Norvège, Islande), l’adhésion au projet européen équivaudrait donc à une perte de souveraineté et à une perte d’indépendance au profit d’une structure européenne perçue comme bureaucratique centralisée.

De plus, ces pays s’inquiètent pour leur agriculture, pour leur pêche et craignent que leur éventuelle future "mise au diapason européen" ne soit très couteuse en termes d’emplois, de qualité de vie et de qualité de la production. C’est pourquoi ils souhaiteraient pouvoir disposer d’exemptions similaires à celles dont ont récemment bénéficié leurs voisins finlandais et suédois lors de leur adhésion (régime spécial d’ "agriculture arctique" leur ayant été concédé en tant qu’exemption spécifique à la PAC)
.

Conclusion :
L’option politique la plus réaliste à court et moyen terme reste la poursuite de la participation de ces deux pays à un processus d’intégration européenne, sans adhésion. Une situation qui n’est pas dénuée d’inconvénients pour les États en question. Puisqu’en refusant l’adhésion, les deux États ne font en fait que subir les politiques communautaires et leurs normes de droit sans même être en mesure de vraiment pouvoir les influencer.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Très intéressant article! :)

Est-ce que tu crois que l'opinion de ces populations a changé avec la crise financière? Je pense aux Danois qui devaient se prononcer pour ou contre l'abandon de leur couronne pour l'euro cette année, et aux Islandais, pratiquement en faillite depuis la semaine dernière...

Audrey et Julien a dit…

Merci !
Je n'ai pas de réponse franche à t'apporter sur ce sujet. Cependant, je pense que la question se situe plus au niveau de la mentalité de la population. Je ne pense pas que tel ou tel évènement les pousse à se ranger massivement derrière l'idée d'une adhésion à l'UE ou à la zone €. Et je ne sais pas si intégrer l'Union les aidera à surmonter la crise financière de meilleure manière... Les prochains mois nous le diront !